Steven Spielberg, E.T., 1982. |
Notre troupe comptait actuellement plus de cinq cents hommes. La vue de ces gaillards du Nord solides et hardis, joviaux, éparpillés par tout le désert pour une chasse endiablée à la gazelle nous enleva, pour l'instant au moins, toute appréhension sur l'issue de notre entreprise. Nous nous sentîmes en humeur de bamboche ; ce soir, décidâmes-nous, serait un soir de riz ; les chefs des Abou Tayis vinrent donc souper avec nous. Après le repas, rassemblés, contre la fraîcheur de ce haut plateau nordique, autour de la braise agréablement rougeoyante où bouillottait l'eau du café, l'on bavarda, sur le tapis, de choses lointaines et d'autres.
Nacer s'étendit sur le dos, mes jumelles à la main, et se prit à considérer les étoiles. Après avoir dénombré à haute voix deux ou trois constellations, il s'extasia en découvrant de petites lueurs qu'il n'avait pas remarqué à l’œil nu. Aouda mit la conversation sur les télescopes (les grands) : il faut raconter comment l'homme, en trois siècles, avait fait de tels progrès qu'il pouvait aujourd'hui construire des lunettes aussi longues que la tente, et compter dans cet instrument des millions d'étoiles inconnues. "Mais qu'est-ce donc qu'une étoile ?" On passa aux soleils qui sont derrière les soleils, aux distances et aux grandeurs inimaginables. "Qu'allez-vous faire maintenant de cette science ? demanda Mohammed. - Nous allons la pousser plus loin encore. De nombreux savants et quelques génies construiront ensemble des instruments dont la puissance dépassera les nôtres autant que les nôtres dépassent la lunette de Galilée. Toujours de nouvelles centaines d'astronomes, discutant et déterminant de nouvelles milliers d'étoiles, en dresseront la carte et donneront à chacune son nom. Quand nous les verrons toutes, il n'y aura plus de nuit dans le ciel."
"Pourquoi les Occidentaux veulent-ils toujours tout ? dit Aouda. - Derrière nos rares étoiles nous voyons Dieu, qui n'est pas derrière les millions des vôtres. - Nous voulons connaître la fin du monde, Aouda. - Mais elle appartient à Dieu", se plaignit Zaal presque irrité. Mohammed se refusa à laisser tourner sa question. "Y'a-t-il des hommes sur ces mondes plus grands que le nôtre ? demanda-t-il. - Dieu le sait. - Et connaissent-ils tous le Prophète, le Ciel et l'Enfer ?" Aouda interrompit : "Garçons, nous connaissons nos districts, nos chameaux, nos femmes. Le superflu et la gloire appartiennent à Dieu. Si la fin de la sagesse est d'accumuler les étoiles, alors vive notre folie !" Aussitôt il parla d'argent ; l'attention fut rompue ; le bourdonnement des conversations reprit. Alors Aouda me murmura que je devais lui faire obtenir de Fayçal un cadeau sérieux quand il aurait pris Akaba.
Thomas Edward Lawrence, traduit de l'anglais par Charles Mauron, Les Sept Piliers de la Sagesse, Éditions Petite Bibliothèque Payot, 1926 (2002), p.386-387.
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