vendredi 7 juin 2013

Industrie Scientifique.

Photographie non attribuée, Exposition Universelle - Galerie des Machines, 1889.
 
Il n’y a plus de castes, de races, d’épidermes aristocrates. Il n’y a plus chez nous que des gens riches et des gens pauvres. Aucun autre classement ne peut différencier les degrés de la société contemporaine. 

Une aristocratie d’un autre ordre s’établit qui vient de triompher à l’unanimité à cette Exposition universelle, l’aristocratie de la science, ou plutôt de l’industrie scientifique. 

Quant aux arts, ils disparaissent ; le sens même s’en efface dans l’élite de la nation, qui a regardé sans protester l’horripilante décoration du dôme central et de quelques bâtiments voisins. 

Le goût italien moderne nous gagne, et la contagion est telle que les coins réservés aux artistes, dans ce grand bazar populaire et bourgeois qu’on vient de fermer, y prenaient aussi des aspects de réclame et d’étalage forain. 

Je ne protesterais nullement d’ailleurs contre l’avènement et le règne des savants scientifiques, si la nature de leur œuvre et de leurs découvertes ne me contraignait de constater que ce sont, avant tout, des savants de commerce. 

Ce n’est pas leur faute, peut-être. Mais on dirait que le cours de l’esprit humain s’endigue entre deux murailles qu’on ne franchira plus : l’industrie et la vente.

Guy de Maupassant, Lassitude in En Sicile, Éditions Complexe, 1890 (1993), p.7-8.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire