dimanche 31 juillet 2011

Vibrations Sonores.

Gold Panda, Lucky Shiner, Ghostly International, 2010.


Il y a concert ce soir. C'est l'événement. Des vibrations sonores s'étendent, des mouvements périodiques parcourent l'étendue avec leurs harmoniques ou sous-multiples. Les sons ont des propriétés internes, hauteur, intensité, timbre. Les sources sonores, instrumentales ou vocales, ne se contentent pas de les émettre: chacune perçoit les siens, et perçoit les autres en percevant les siens. Ce sont les perceptions activent qui s'entr'expriment, ou bien des préhensions qui se préhendent les unes les autres: "D'abord le piano solitaire se plaignit, comme un oiseau abandonné de sa compagne; le violon l'entendit, lui répondit comme d'un arbre voisin. C'était comme au commencement du monde..." Les sources sonores sont des monades ou des préhensions qui s'emplissent d'une joie de soi-même, d'une satisfaction intense, à mesure qu'elles se remplissent de leurs perceptions et passent d'une perception à une autre. Et les notes de la gamme sont des objets éternels, pures Virtualités qui s'actualisent dans les sources, mais aussi pures Possibilités qui se réalisent dans les vibrations ou les flux. "Comme si les instrumentistes beaucoup moins jouaient la petite phrase qu'ils n'exécutaient les rites exigés d'elle pour qu'elle apparût..." Mais voilà que, à cet ensemble, Leibniz ajoute les conditions d'un concert baroque: si l'on suppose que le concert se répartit en deux sources sonores, on pose que chacune n'entend que ses propres perceptions, mais s'accorde avec celles de l'autre encore mieux que si elles les percevait, en raison des règles verticales d'harmonie qui se trouvent enveloppées dans leur spontanéité respective. Ce sont les accords qui remplacent les connexions horizontales. 

Gilles Deleuze, Le Pli, Leibniz et le Baroque, Éditions de Minuit, collection Critique, 1988, p.109-110.

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